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Maroc, un art de vivre et de découvrir.

mardi 8 décembre 2009, par Hervé

Maroc, cherchez le message au travers des paysages.

INCH ALLAH ….

Le Maroc c’est une odeur chaude, très complexe, faite de senteurs d’humanité, de thé à la menthe et de cannelle. C’est aussi un pays ouvert aux vents d’Atlantique, aux climats changeants et aux paysages anachroniques. Un pays où se manifeste partout la présence humaine. Un tas de chiffon au pied d’un arbre au beau milieu de nulle part va soudain s’animer .. et voilà que démarre un gars qui, attendant je ne sais quoi, s’en va pour je ne sais où. Vous allez vous arrêter dans un lieu qui semble complètement désert et vont surgir d’une façon assez mystérieuse, une troupe d’enfants qui vont s’enhardir jusqu’à venir vous mendier quelques piécettes.

Si vous sympathisez, ou tout simplement si vous demandez l’hospitalité vous vous retrouverez assis sur un tapis ou allongé sur des coussins, à boire les trois thés à la menthe et à manger avec les doigts les gâteaux de bienvenue et la viande du tajine qui a cuit sur la cendre.

Les villes sont souvent un entassement extraordinaire de petites maisons à terrasse dont la plupart sont des magasins ou des ateliers d’artisans. On y rentre par des allées souvent bordées de palmiers et de bougainvilliers et dès que vous vous plongerez dans le cœur de la cité vous vous retrouverez au sein d’une médina grouillante. Ces souks populeux sont débordants d’un entassement de marchandises les plus variées. Vous aurez toutes les peines du monde à ne pas céder aux invites des marchands et vous y prendrez de sensationnelles leçons de marchandage.

Quand vous rentrez dans un souk c’est le Moyen âge qui vous saute à la figure .. un Moyen âge où les téléphones portables retentissent au beau milieu des glapissement des poulets qu’on égorge et des « Balek !! Balek !! » le « Attention !! » des porteurs qui alimentent les boutiques et livrent les commandes .. Les ânes plient sous des charges imposantes et leurs remorques d’un autre âge portent sur les cotés les stigmates des collisions. Au rythme des mélopées arabes une bruyante marée humaine déferle entre les échoppes agglutinées dans un enchevêtrement médiéval de venelles étroites et sinueuses. A chaque spécialité correspond une ruelle, quelquefois un quartier. Ici c’est le souk des tapis, des potiers, des menuisiers, des teinturiers avec leurs écheveaux bariolés comme des oriflammes. Là ce sont des orfèvres qui exposent bijoux, services à thé et plats en argent. Plus loin vous trouverez les marchands d’épices , de henné, de babouches. Dans le souk vous y rencontrerez le riche bourgeois, le touriste en goguette, le gamin qui mande affaire à faire, le rabatteur qui cherche à toucher son pourcentage … Les souks c’est aussi la collision entre les deux aspects de la civilisation .. d’un coté le Maroc d’hier vivant au rythme du Coran et des cinq prières quotidiennes, de l’autre celui d’aujourd’hui, saisi par la fureur de vivre, amateur de disco, de téléphones portables dernier cri, de musique américaine et de Coca cola.

Vous ne comprendrez sûrement jamais tous les aspects de l’Islam mais lorsque vous approchez d’une mosquée vous trouverez les mêmes sensations de paix que les gens qui viennent s’y recueillir. Ici tout concourt à donner des impressions de calme propices au recueillement : lignes sobres, fraîcheur des jets d’eau, équilibre des rosaces et odeur de cèdre des portes et des plafonds.

Quitter les plaines c’est grimper les pentes des différents Atlas avec cet extraordinaire changement de paysage. Les cultures, les pâturages et les forêts s’entremêlent jusqu’à donner, pour peu que vous soyez un peu en altitude, l’impression que vous dominez un gigantesque tapis. Ifrane, ses cigognes, et ses maisons de tuiles rouges qui donnent à la ville des allures strasbourgeoises. Azrou, ses forêts de cèdres, ses marchands de minéraux et ses singes qui batifolent. Timhadite et son souk. Le Col du Zad et ses plus de 2000 m d’altitude … ce sont partout des montagnes austères, des plateaux tabulaires, des genévriers qui n’ont plus d’âge, des défilés qui semble mener nulle part .. une fois le dernier tunnel franchi c’est la découverte des premières palmeraies .. on passe de l’ocre au vert et les maisons se font désormais oublier au milieu de la végétation.
C’est un déferlement de couleur qui vous assaille .. Le jade des palmiers, le rouge de la roche, le bleu de la source de Meski et ce jaune indéfinissable des dunes qui plus on descend vers le sud ne tardent pas à border la route. Une route qui est due à la fureur des hommes, une fureur de vivre pour amener la civilisation jusqu’au porte du désert … malheureusement avec son lot de pollution et de manque d’authenticité .. Pourtant il reste quelques coins magiques où, guidé par le touareg rencontré par hasard, on va pouvoir, au bord de la grande dune, toucher du doigt le silence.

Sur la route c’est, sûrement due à la saison, une rencontre continuelle avec les oiseaux les plus divers probablement en migration : Cigognes, martinets, guêpiers, rolliers , pies-grièches, comme s’il fallait que les couleurs soient aussi présente d’une façon permanente, même au beau milieu du ciel.

Et toujours ces routes quasi désertiques qui se déroulent au fur et à mesure des kilomètres et des tours de roues. Au détour d’une montagne un ksar va attirer notre attention, c’est la visite impromptue au bout d’une paire de kilomètres de piste et le contact humain qui pour seul langage aura celui du thé à la menthe et de la galette chaude, contact entre notre civilisation mécanique et celle de la babouche et de l’âne qui aide à tirer l’eau du puits. Et toujours les yeux de ces enfants émerveillés par nos véhicules, des gamins qui attendront notre départ pour se partager les quelques stylos et autre tee-shirts que nous leur laisserons en souvenir.

Le conflit permanent entre l’eau et la roche est aussi source d’étonnement, le défilé de la Tohdra impressionnant, dans des roches rouges aux formes torturées, avec ces ksours de terre ocre et ses cultures sous les palmiers, tout cela au bord d’une eau aussi limpides que les yeux de celle qui va nous servir le thé, nous conduira jusqu’à ce hameau caché où bien peu accèdent. Sous la tente berbère nous partagerons l’omelette avec ceux qui sont devenus nos amis …Une autre rencontre magique au cours d’un voyage ou il faut bien souvent s’évader du programme initial.

La vallée du Dadès, avec au loin les montagnes métallifères du djebel Sahro, s’ouvre sur le chott de Ouarzazate. Le temps est souvent changeant, les pluies gonflent largement les oueds et ceux ci roulent des eaux couleur de sang.

La ville s’est endormie dans les derniers rayons du soleil et le lendemain l’astre sublime nous l’a faite découvrir différemment. La lumière au Maroc est tellement présente qu’elle est partie intégrante du paysage. Rien ne vaut le départ du matin où le soleil rasant dispense sur le ruban asphalté des ombres tellement mystérieuses que l’on a l’impression qu’on est dans un autre monde. Découvrir dans l’aube qui émerge une piste qui est seulement utilisée par ceux qui se rendent, la plupart à pied, dans quelques endroits où l’on dispense du savoir ou où l’on va gagner sa maigre pitance,

Essaouira la blanche et son marché au poisson, ses artistes en pleine rue et ses menuisiers aux doigts de fées c’est la porte de l’Atlantique. La mer est comme un soulagement après la dose de désert que l’on avait pris en quelques jours. Passer du rouge au bleu c’est comme si on changeait de pays, de civilisation, d’atmosphère … seules les odeurs restaient les mêmes.

Pour rejoindre Marrakech les cultures prennent de l’importance. Les grandes plaines alluvionnaires d’où sortent la grande majorité des légumes primeurs qui envahissent l’Europe semblent pourtant être encore cultivées comme il y a une cinquantaine d’années chez nous. Sur le bord de la route c’est le marché permanent et dans les villages traversés, si par hasard, vous y passez le jour de souk vous aurez comme une petite idée de ce pourraient être les jardins du Paradis.

Marrakech c’est la capitale du tourisme. Djema-el-Fna, la place la plus connue au monde après Tien-al-Men, est un immense bric à brac de spectacles et de mendicité. Il y a pourtant trop de touristes. Dans les souks jamais nous n’avions autant été sollicités. Lorsque nous avons fait le tour de la ville nous avons été frappé par les bidonvilles et les masses humaines impressionnantes. Marrakech la belle ne se supporte que difficilement dans les endroits qui ne sont pas des pôles touristiques. Du haut de ses 70 m le fin minaret de la Koutoubia qui domine la palmeraie est comme le doigt de l’espoir de tous ces pauvres hères qui traînent dans les rues en côtoyant les richesses de ce monde.

Le Maroc c’est dans ses paysages l’Afrique la plus variée et, dans ses signes de civilisation, l’Islam le plus imprégné d’influences multiples. C’est encore une harmonie dans ses arts, ses costumes, ses coutumes, un royaume de lumière. Que dire de l’accueil que nous y avons reçu, incroyable de gentillesse, de prévenance, mais aussi de sollicitations. Les murs épais et aveugles sur la rue, aux portes impressionnantes, défendent les biens les plus précieux à la fois matériels et spirituels. Partout ce fut le même art de vivre, la même politesse, cette prédilection pour le vêtement ample et drapé, pour le calme, le silence et les eaux vives. Nous y avons découvert ces aliments épicés ou sucrés qui bien souvent nous ont donné envie de les manger à la main, à l’orientale. Au Maroc il n’y a pas d’inquiétude constante mais tout le temps cette soumission à la volonté de l’au delà. Tout invite à la réflexion et leur « Inch Allah » est bien plus sage que notre fièvre du modernisme. Nous ne pouvons nous empêcher d’y retourner, y retourner pour y découvrir d’autres horizons et pour y retrouver une certaine ambiance.
Pour ceux qui ont ramené plein de souvenirs et qui vont, une fois rentré chez eux, à l’occasion d’un couscous ou d’un tajine partagé entre amis vivre de bons moments presque marocains où ils raconteront leurs souvenirs de voyage, si je peux leur donner un conseil, ce soir là revêtez des habits amples, asseyez vous sur quelques poufs, enfilez colliers et bijoux et mangez avec les doigts … Dans l’ambiance d’une musique berbère appréciez cette soirée souvenir projetez vous dans le passé, profitez du moment présent et donnez vous envie d’y retourner. Soyez certains, ce soir là, vous sentirez ce que « Inch Allah » veut dire !!

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