Essai rétro : Yamaha XTZ 660 TENERE de 1992 !!!
C’était la moto de mon toubib, c’est vous dire qu’elle n’avait jamais trop souffert .. je ne dis pas cela en généralisant car j’en connais d’autres, de toubibs, qui sont des fanatiques de la poignée dans le coin, mais le mien c’est un calme. Il a fait 18000 bornes de visites en campagne avec cet engin qui confère par certain aspect au tracteur agricole. Il a du changer une fois le kit chaîne et s’est fendu d’un pneu arrière parce qu’un de ses potes gendarme lui a fait remarquer qu’il avait autant de trace dessus que sur un tableau de Cy Twombly. Par contre il avait toujours respectueusement effectué les révisions se gardant bien toutefois entre chacune de jeter ne serait ce que le moindre regard sur tout ce qui concernait la machine !!
Et puis un jour il en a eu marre, il est passé au 4x4 et la brelle est restée durant une paire d’années à se morfondre sous un bâche .. et un jour la bâche s’est ouverte sous un coup de vent !!
Je passais par là et cette bécane couverte de poussière a semblé me faire un petit signe .. était ce la brelle ou la bâche qui battait, résultat des courses quelques heures après, devant un petit blanc nous avons traité ..
Clés, papiers, me voilà nouveau proprio d’un trail de 92 à redémarrer.
Remorque, maison, vidange d’un carburant qui sentait le pourri, nettoyage du carbu, un peu d’air dans les pneus … Une nouvelle batterie .. Contact .. starter à fond !!
Le démarreur tourne, le berlingot émet un bruit quasi identique à celui que l’on peut entendre lors du lancement du démarrage d’un tracteur All Gaier .. et puis, comme par miracle le moteur s’ébroue et dès que le starter est coupé, prends un super ralenti pom pomesque .. Deux ans de disette qui viennent de s’évanouir d’un coup pour le gros mono .. C’est reparti pour un tour.
Mes derniers souvenirs de gros mono dataient du temps où je pestais chaque matin quand il fallait que je démarre mon 500XT afin d’aller au taf .. Mais je me souvenais de l’indicible plaisir que je prenais à son guidon, dans ces petites routes cévenoles à jouer uniquement de la boite sans jamais toucher aux freins .. Il fallait de suite que je retrouve un peu cela .. Casque sur la tronche, zonblou, une paire de botes et c’était parti.
Même si le berlingot était issu de la même fabrique que mon vieux XT il n’y avait plus grand chose à voir entre les deux. Et pourtant on ressentait au guidon de cet engin comme une petit relent d’Afrique .. surement le nom !!
Cela fait aujourd’hui plus de 27 années que Yam a commis la première Ténéré, en déclinant toujours sur la même base la fabrique au diapason a généré un véritable style. Les possesseurs de ces engins devaient tout à la fois être capable d’aller chercher le pain au coin de la rue comme de se retrouver au fin fond du Sahara pour boire un thé à la menthe .. eh bien croyez moi en lisant les différents forums relatifs à cette moto, je me suis rendu compte que c’est exactement ce qu’ils ont fait.
En fait j’ai compris pourquoi mon toubib avait acheté ce truc .. c’était la bécane tracteur par excellence .. Cela manquait à la maison, eh bien l’erreur était réparée.
Bon, allez, je ne vais pas vous parler des qualités et des défauts d’une brelle qui a désormais atteint sa majorité .. 48 CV pour vous traîner en Cévennes cela suffit largement. Hauteur de selle convenable, je pose les pieds par terre mais je remarque quand même que le combiné amorto AR a parfaitement supporté le poids des ans .. pas la moindre fuite et toujours aussi efficace.
Le Gros mono est certe plus civilisé que celui de mon XT mais je ne le trouve pas si fade que cela. Certes ce n’est pas un trail de course mais les reprises pour peu qu’elles soient faites au dessus de 2300 tours n’engendrent aucun cognement et sont véritablement franches.
La boîte de vitesses souffre de la maladie des Yam, à savoir une sélection dure et peu précise quand au frein avant, on peut le qualifier au mieux de ralentisseur, le frein arrière servant lui de garniture à la roue.
On sent bien que cette machine n’est pas Sylphide .. Cela doit bien approcher les 180 kg avec les pleins, comme tous les trails pour manœuvrer à l’arrêt il n’est pas recommandé de mesurer moins d’1m70 et je suppose que pour les adeptes du TT, je sais qu’il y en a , je l’ai lu !! Eh bien cela doit être la galère pour la relever ou la sortir d’une ornière !!
Esthétiquement il faut mieux être dessus qu’à coté, avec son CX conférant à celui d’un bahut Louis XV et son allure taillée à la serpe on ne peut vraiment pas dire que c’est une jolie machine. Même les coloris ont été choisis un grand jour de tristesse. On dirait que cette moto a tout fait pour rester dans l’anonymat le plus complet malgré un pseudo qui invitait au voyage !!
Mais qu’est ce qui a donc poussé moult motards a s’intéresser à celle brelle au point que désormais elle peut se vanter de faire date dans le monde de la moto.
Eh bien il suffit de rouler un peu avec pour comprendre.
La machine est bien équilibrée et correctement suspendue, dès que le paysage devient un tantinet tourmenté c’est un plaisir d’enrouler les petites routes à une allure qui permet de largement apprécier le paysage et sans crainte de devoir tomber un rapport pour accéder au sommet suivant.
Même si il est d’une esthétique plutôt contestable le carénage garantit un excellent confort au pilote qui de surcroit bénéficie d’une selle large et de repose-pieds disposés bas qui assurent une position tout à fait naturelle.
Le réservoir de 20 litres doit vous garantir une autonomie d’au moins 340 bornes et le petit porte paquet est tout prêt à accueillir le top case qui va bien pour aller faire son marché. Ce qui est bien c’est qu’effectivement ce n’est pas en rajoutant cet accessoire que l’on risque de défigurer la machine.
Un tracteur je vous dis, un trail à mettre entre toutes les mains. J’ai poussé la plaisanterie jusqu’à prendre la piste de la Fage .. eh bien je me suis régalé là même où j’avais galéré avec mon Tiger de 40 kg de plus et surtout beaucoup plus haut suspendu.
En sortant des sentiers battus avec cette machine qui, par rapport à bien des motos d’aujourd’hui a le mérite d’être vraiment polyvalente, j’ai compris pourquoi à un engin qui invite à l’humilité et à la discrétion la marque au diapason avait associé ce patronyme qui est une invite au voyage : « Ténéré ».
J’ai presque envie de ne pas la priver de « désert » !!
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